Qui va piano va sano, semblaient nous dire pendant tout ce temps les Américains. Car alors que toutes les grandes puissances ont leur TGV, et depuis longtemps (France, Allemagne, Espagne, Italie, Japon, Chine, etc.), les Etats-Unis, eux, qui sont pourtant toujours à la pointe dans tous les domaines ou presque, en étaient dépourvus. Mais ce temps-là est révolu, ou du moins il le sera dès 2028 avec l'ouverture prévue de la ligne Rancho Cucamonga - Las Vegas, sur la côte Ouest. Précisons ici que Rancho Cucamonga se situe dans le comté de San Bernardino, jouxtant lui-même celui de Los Angeles.
Les Etats-Unis, ce géant américain, n'a pas de TGV. Etonnant quand on y pense. Mais si on regarde le cas britannique (leur High Speed 2 acté en 2012 n'est toujours pas sur les rails), on comprend que l'affaire n'est pas si simple. Penchons-nous sur cette question, et sur ce TGV américain qui verra bientôt le jour sur la côte ouest des USA.


Voici à quoi ressemblera probablement le 1er TGV américain, entre los Angeles et Las Vegas
- © BrightlinePourquoi ce retard ?
On ne peut pas à proprement parlé de retard, car les USA ont l'un des réseaux ferroviaires les plus étendus et performants au monde (pour le frêt). Il s'agit plutôt d'un choix stratégique. Alors à quoi tient-il ? D'abord, les Américains voyagent énormément en voiture. C'est culturel. Tout foyer à sa, voire ses voitures. Hormis les citadins qui empruntent les morning trains pour échapper aux embouteillages des villes et de leurs banlieues, on se déplace essentiellement en voiture dès qu'il s'agit de liaisons intercités. On aime faire de la route, seul ou à plusieurs, s'arrêter quand on veut, redécouvrir son comté. Et quand les distances commencent à sensiblement s'allonger, on prend volontiers l'avion.

Carte du tracé © Brightline
Il y a aussi que le réseau des bus, sur tout le territoire, est plus développé que celui des trains et est très économique. Il y a peu de lieux où vous ne puissiez pas aller en bus (les billets commencent à 1 dollar, avec BoltBus et Megabus). Les limitations de vitesse sur réseau ferré sont aussi en cause et empêchent un TGV d'y rouler à 300 km/h ou plus. A moins de changer la règlementation, ce qui semble se profiler.

En attendant, il y a de nombreux high speed trains (trains rapides) sur le territoire, surtout sur la côte est, mais aussi entre Chicago et San Francisco ou L.A., ou encore le Brightline high speed train qui se balade dans les grandes villes de Floride. Brightline, qui est à l'origine du projet de TGV...
Alors à quoi tient ce passage au TGV ?
On s'attendait plutôt à un TGV allant d'est en ouest, capable de relier les deux côtes en un temps record. Cela aurait fait le bonheur de nombreux touristes, mais aussi des Américains eux-mêmes, qui souvent ne connaissent pas la côte opposée à celle où ils habitent. Compte-tenu notamment de ce qui a été dit plus haut, il en sera tout autre, du moins pour les premiers jalons que cette initiative pose entre la Californie et le Nevada. Le trajet visé porte sur moins de 370 km, ce qui est très court à l'échelle du pays, et sera parcouru en 2 h environ. Le début des travaux de cette ligne, la Brightline West, reliant Las Vegas à Los Angeles, a été inauguré le 22 avril 2024
Finalement, il semble que l'initiative tienne principalement au tourisme, Las Vegas étant mal desservi par l'aérien, notamment au départ de l'Europe, et les liaisons entre les deux grandes villes se faisant actuellement exclusivement par la route ou les airs. Ce TGV, qui ira deux fois plus vite que la voiture, sera donc incitatif pour tout Français ou Allemand par exemple, désireux de découvrir Las Vegas (car les vols Paris-Los Angeles sont nombreux). Il sera également un gain de temps pour les habitants du comté de Los Angeles désireux d'aller y passer un week-end. Cela vaut aussi pour ceux de Vegas qui voudraient sortir du désert névadais pour aller piquer une tête dans l'océan à L.A. Et ce d'autant plus en 2028, année ou Los Angeles accueillera les Jeux Olympiques d'été.

Aux USA, beaucou de trains touristiques, comme celui-ci entre Durango et Silverton, Colorado
- © Nick Fox / ShutterstockL'autre objectif semble être de désengorger les routes de leur trafic, et donc aussi maîtriser la pollution. Au plan industriel, c'est le groupe allemand Siemens qui a remporté l'appel d'offre face au français Alstom pour la construction des dix TGV qui parcourront cette nouvelle ligne qui devrait transporté près de 11 millions de passagers par an.