Dans la région du Kansai, entre Osaka à l'ouest et Kyoto au Nord, l'ancienne cité impériale de Nara dispose depuis toujours d'un grand parc de cinq cents hectares qui va du Wakakusa-yama, ou Mont Wakakusa, au centre de la ville. Un bel espace de verdure et d'arbres qui ne manque pas de vie, et pour cause, mille quatre cents cerfs, biches et leur progéniture vivent là depuis la fin du 19e siècle, et même sûrement depuis bien plus longtemps.
Si une chose est sûre dans l'univers du voyage, c'est bien que le Japon est synonyme d'un dépaysement total ! Nara, à 20 km d'Osaka et une heure de voiture de Kyoto, chamboule notre rapport à la nature et plus précisément aux cervidés. Car ici, cerfs, biches et faons vivent dans un rapport parfaitement apaisé aux habitants, depuis un siècle et demi.


Le nourrissage des cervidés, une tradition du grand parc de Nara
- © Sergei Mugashev / ShutterstockAujourd'hui, on vient de tout le pays pour les voir communier avec les habitants de la ville qui ne manquent pas de les nourrir après les avoir poliment salués. Evidemment, c'est l'une des attractions touristiques les plus insolites et touchante qu'on puisse voir au pays du Soleil Levant.
Pourquoi cette particularité ?
Comme à la ferme, les animaux n'ont pas peur à partir du moment où on ne leur veut pas de mal. C'est le cas des cerfs shika qui, depuis un siècle et demi, se sont habitués à l'homme. Domestication rendue d'autant plus aisée que la population les nourrit de friandises dont ils raffolent. Mais pourquoi cet intérêt pour cet animal ? En réalité, c'est à la tradition shintoïste qu'on doit ce lien très particulier, les cervidés étant considérés par elle comme des messagers sacrés des dieux.

Biches et meurs faons aux abords du sanctuaire Kasuga Taisha
- © Y-kay / ShutterstockAinsi la tradition, très ancienne, se perpétue. Car les cerfs de Nara sont protégés depuis toujours du fait de leur lien avec le sanctuaire Kasuga-taisha. Selon la légende, une puissante divinité shintoïste est venue à Nara sur le dos d'un cerf blanc, et depuis on voit en lui un animal sacré, en sa qualité de messager divins. Prendre soin de lui, de sa famille et de sa progéniture est resté une évidence, voire une tradition.

Cette biche vient chercher une galette de riz dans le parc de Nara
- © Nixx Photography / ShutterstockLe nourrissage des cerfs, entre amusement et tradition
En la matière, le nourrissage, pourtant laissé à la discrétion des habitants et des touristes, doit se faire uniquement avec des biscuits spécialement conçus pour eux. Ces shika senbei, faits de farine de blé et de son de riz, sont vendus sur place. Les aliments inappropriés, comme des sucreries par exemple, sont nocifs pour eux et leur donner serait contraire à la philosophie du lieu.

Les faons et leur mère ont élu domicine autour des sanctuaires du parc
- © Jordi C / ShutterstockIl faut dire que les Todai-ji, Kofuku-ji et Kasuga Taisha sont également dans l'enceinte du parc de Nara. Si les Japonais sont au fait de ces questions alimentaires, il n'en va pas de même des touristes, et des explications leur sont fournies sur des leaflets et des panneaux. Cela est nécessaire vu les quantités de nourriture en jeu : 20 millions de shika senbei leur sont distribués chaque année.
Une communion presque magique avec la nature
Mais l'autre grand attrait du lieu, outre sa beauté et la sérénité qui s'en dégage, surtout aux abords des sanctuaires où les biches et leurs faons ne manquent pas de se rendre très régulièrement, réside dans le rapport quasi-cérémoniel qui unit ici l'homme à l'animal. Résultat d’un apprentissage naturel par association, les cerfs de Nara inclinent la tête en signe de révérence, indiquant aux humains qu’ils attendent de la nourriture.
Ce comportement anthropomorphique est unique au monde chez les cervidés. Il est d'autant plus remarquable que la plupart l'ont adopté. Et ils répondront à un salut humain par hochement de la tête.
